Ça y est, c'est un Cap-Hornier fraîchement adoubé qui vous écrit ! Récit d'une semaine fort sympathique dans des coins grandioses avec les quatre saisons qui défilent plusieurs fois par jour, entourés de phoques, dauphins, pingouins, pétrels, cormorans et - c'est mon coup de coeur de la semaine - d'albatros au vol majestueux.
Le bateau
Tari II, un 40 pieds à coque alu en forme (c'est assez rare pour être signalé), à la ligne typique des voiliers des années 70 : étrave inclinée, entrées d'eau pincées, arrière étroit, coque légèrement frégatée. Je m'en rendrai compte plus tard, mais la bête n'est clairement pas un foudre de guerre : 110 degrés bord sur bord en pipant au max, on fait mieux ! L'état des voiles n'aide pas. Tout est costaud, et on voit clairement qu'on a affaire à un bateau de voyage et pas de cabotage ni de régate : winches surdimensionnés, capote rigide en alu (indispensable), cockpit fait pour tailler la route plus que pour manoeuvrer, et 2 dévidoirs de 150m d'aussières de part et d'autre du mât pour sécuriser les mouillages et servir de traînards le cas échéant. Rien d'esthétique, que du "trop fort n'a jamais manqué" ; d'ailleurs tous les voiliers du coin obéissent au même précepte.
L'équipage
Mickie, le skipper, un argentin très sympa, et Pablo, son équipier qui a mon âge. Pour les autres passagers, un groupe de 5 italiens débonnaires - dont un ancien contre-amiral avec plein d'histoires à raconter. L'assurance de ne jamais s'ennuyer !
Journal de bord : lundi 12
Nous passons des heures aux douanes argentines pour régler la sortie de territoire avant de quitter Ushuaia et de mettre le cap sur Puerto Williams, distant de 25 milles, pour faire les formalités d'entrée sur le territoire chilien.
Petite explication : Ushuaia est en Argentine, mais le Cap Horn est au Chili et on n'entre pas comme on veut dans les eaux territoriales chiliennes, d'autant qu'on navigue sur un canal - le canal Beagle - et qu'on se fait forcément intercepter si on ne passe pas par la douane. 5h de nav au moteur (pour cause de pétole totale) nous voici à Puerto Williams, 2000 habitants, qui est véritablement la ville la plus australe du monde.
Nous nous amarrons à couple du bateau d'Isabelle Autissier, qui revient du Cap Horn, le temps de faire les formalités. Quelques heures plus tard nous repartons pour Punto Toro, un minuscule port à 25 milles à l'Est. Toujours pas de vent.
"- Bonne nav !, me lance Isabelle alors qu'on met les gaz.
- Mouais, avec une pétole pareille on est encore bons pour 5h de moteur !
- Fais gaffe, ici tu sais jamais ce que tu vas avoir !"
Et de fait, une heure plus tard nous avions une vingtaine de noeuds de brise portante... D'une manière générale le temps change continuellement et de manière très rapides ; par conséquent les paysages offrent sans cesse de nouveaux visages suivant la lumière qui les éclaire et on en prend plein les yeux. Nous arrivons vers 2h du mat à Punto Toro.
Mardi 13
Nous traversons la Bahia Nassau, qui sépare le Canal Beagle du chapelet d'îles dont fait partie le Horn. Une cinquantaine de milles d'abord au portant. Je prends la barre pour embouquer le passage Washington, qui au début ressemble à ça :
10 minutes plus tard un beau grain à 30 noeuds arrive, et on ne tarde pas à récupérer une bonne houle du Pacifique d'environ 2m. Ça prend tout de suite cette gueule-là (moins sympathique de prime abord) :
Nous mouillons en fin de journée à Puerto Maxwell, au milieu d'un paysage splendide.
Mercredi 14
Le jour de gloire : nous passons le Cap Horn par un temps de demoiselle ! D'abord une dizaine de noeuds de SW, fraîchissant à 20, nous poussent tranquillement vers le Sud de l'Île Horn et son caillou emblématique, massif sculptural et effrayant marquant le bout du monde.
Par un heureux hasard je récupère la barre au moment de passer la longitude du Cap, et je peux vous dire que je n'ai jamais autant apprécié barrer un veau ! Voilà bien-sûr LA photo de la semaine :
Nous faisons le tour de l'île avant de débarquer côté Nord pour aller dire bonjour au gardien du phare qui vit seul avec sa famille. Celui-ci me dit que le vent maximum enregistré sur l'île est de plus de 150 noeuds ! Nous repartons sous 20 noeuds pour aller mouiller à la Caleta Martial, un autre site superbe.
Jeudi 15
Traversée de la Bahia Nassau dans l'autre sens (en direction du Nord, donc) par un vent de force variable (entre 15 et 25 nds) mais de direction bien établie pour nous faire c****, à savoir plein Nord. Une journée de près sous un ciel déclinant toutes les palettes de gris imaginables avant de mouiller près de Punto Toro, où nous avons passé notre première nuit.
Vendredi 16
Réveil pénible à 6h du matin par un fort vent de SW et une vilaine houle qui rentre dans la baie : le mouillage dérape et nous sommes à 30m des côtes, il faut partir en vitesse. Nous trouvons refuge à Punto Toro où nous allons passer la journée sans pouvoir naviguer, le temps de laisser passer une sale dépression avec des vents de 80 noeuds dans la Bahia que nous avons traversée la veille !
Je n'ai jamais vu le baromètre aussi bas. Pas grave, je finis le bouquin de Julie (passionnant) et je dévore 100 ans de solitude (merci Xavier !). Nous profitons du pêcheur local pour manger d'excellents fruits de mer, et encore une fois je ne cesse d'admirer les lumières changeantes sur le Canal Beagle.
Samedi 17
Opérations douanes, mais en sens inverse : d'abord Puerto Williams pour sortir du Chili, puis Ushuaia pour entrer en Argentine. Encore une journée de près par un bon vent d'Ouest (25-30 noeuds, un peu plus dans la nuit). Nous arrivons à 2h du mat' à Ushuaia.
Voilà pour le récit de cette semaine ; au programme de la suivante, quelques jours ici puis départ pour le Chili et le parc naturel Torres del Paine pour un trek de quelques jours.
¡Hasta luego!
8 commentaires:
Ca ressemble pas mal à la Norvège. Ca t'aurait coûté moins cher d'y venir.
Je laisse à François le soin de répondre à ces inepties : "Le commentaire perfide et bassement économique de Clément n'est sûrement pas recevable en l'état ! Qu'il aille voir pour pouvoir comparer."
Tac ! ;)
Coucou ma grosse motopompe!
Ca faisait un moment que je n'avais pas jeter un coup d'oeil a ton blog, j'ai pas ete decu! Bon le style laisse a desirer, comparee a celle de louimama j'entends ;-)
Take care, tu nous manques!
J'ai peut-etre pas le style, mais au moins j'ai l'orthographe ! :)
Mais merci pour ton commentaire, }a fait toujours plaisir.
Becots
Ju
Meuh tu sais bien que je t'embetais... Et pour l'orthographe, j'avoue avoir ecrit ca comme un barbare ;-)
Gros bisous!
Après des heures et des heures heures passées dans les dictionnaires à la lettre C, j'ai enfin trouvé le mot caché dans ton blog (C****). Il doit s'agir d'un verbe familier du premier groupe dont la définition est selon Médiadico:
verbe transitif et intransitif
[familier] Déféquer.
causer des ennuis à quelqu'un.
s'ennuyer.
Dis moi, si j'ai bien trouvé, qu'est ce que je gagne?
@ Denis : ta perspicacité m'épate, je sais pas ce que tu gagnes mais j'ai le temps d'y penser !
@ Vince : la bise à tous
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