dimanche 19 avril 2009

On ferme !

Vous l'avez remarqué à l'absence de posts ces derniers jours, la petite balade est terminée. Avec mon retour en France ce blog perd sa raison d'être puisque je l'avais créé à mon départ pour donner des nouvelles à ma famille et mes amis restés en France (et ceux qui postèrent le plus de commentaires furent les X expatriés aux US, enfin passons...).

Une vie un peu moins trépidante m'attend, avec pour première mission de trouver un job.

Merci à tous ceux qui m'ont suivi pendant ces (presque) deux ans et bon vent à tous !

mercredi 8 avril 2009

Sous la plage, l'enfer...

Depuis Cartagena, je voulais me rendre au Parque Nacional Tayrona, qui étend de vastes plages désertes en bordure d'une jungle épaisse. Un peu Koh Lanta, sans Denis Brogniard... Mais un chilien, une allemande et des masses de colombiens m'ont finalement convaincu d'aller à Playa Blanca, l'une des plus belles plages des environs : sable blanc, cocotiers, plage quasi déserte - sauf de 14 à 16h, quand les bateaux débarquent leur cargaison de touristes venus pour la journée depuis Cartagena. Ca a l'avantage d'etre plus beau, plus près et moins cher, me disent-ils.

Je pars donc pour deux jours sans me poser trop de questions, par un beau matin, sur un gros bateau rempli de beaufs - expérience sociologiquement intéressante, comme toujours en pareil cas. Le trajet permet d'admirer quelques-uns des bastions qui défendaient (plus ou moins bien) la ville, comme ici le Castillo de Santacruz, photographié une fois à l'aller, une fois au retour.


Suit une petite visite de l'aquarium des Islas de Rosario, pas exceptionnel mais avec un show de dauphins assez mignon.


Puis on débarque à la plage proprement dite, qui a effectivement des airs de petit paradis (comme une plage des Caraïbes, quoi), mais de loin car en ce dimanche - qui plus est période de vacances pour les colombiens - elle est prise d'assaut par les touristes. Il suffit d'attendre le soir pour qu'elle redevienne déserte, aux mains des quelques rares personnes qui restent camper sous tente, en hamac ou à même le sable.


Je vous ai dit que j'y ai passé deux jours, voici donc une petite photo de ma chambre, de l'intérieur puis de l'extérieur. Les habitués remarqueront que la moustiquaire n'est pas encore à poste, mais rassurez-vous elle était bien du voyage. J'ai d'ailleurs découvert l'existence de modeles spéciaux pour hamacs très bien foutus.


Quelques petites vues supplémentaires pour vous prouver que c'est jouli :


Pas grand chose à faire, j'en profite donc pour me reposer en cette fin de voyage qui ne fut pas spécialement reposant : glande, plongée (enfin apnée), jam-session avec un canadien et un équatorien virtuose - l'occasion de se rendre compte que rythmiquement, le rock c'est vraiment pas très recherché comparé aux styles locaux.


Mais comme le suggère le titre, tout ceci est trop beau pour être vrai, et il n'y a pas besoin de fouiller beaucoup pour voir les effets désastreux du tourisme de masse. Le soir, la plage est jonchée de détritus laissés par ceux qui ne prennent pas la peine de se bouger jusqu'aux poubelles. Cela dit, pourquoi le faire quand on se rend compte que les sacs poubelles finissent directement 20m derrière les cabanes qui bordent le littoral, transformant le bord de la forêt en décharge à ciel ouvert ?

Les sud-américains répètent à l'envi que les grandes entreprises étrangères sont les premières à venir saccager leurs pays. C'est vrai dans une certaine mesure, et quand on voit par exemple ce que Chevron a fait en Équateur (80 fois l'équivalent de l'Exxon Valdez sciemment déversés dans la jungle) on s'étonne que cette entreprise coule des jours heureux malgré le procès pour crimes contre l'humanité qui lui est intenté. Cependant les mêmes sud-américains sont les premiers à pourrir leur propre environnement sans avoir aucune conscience de la portée de leurs actes, et pratiquement chaque village de campagne est entouré d'un champ d'immondices (je ne parle même pas des villes, dont certaines comme Lima sont des décharges à part entière).


C'est encore moins glorieux sous l'eau. En plongeant, je me rends compte que le corail, situé juste au bord de la plage, est dans un état désastreux et qu'environ 80% a été blanchi (est mort, pour faire simple). Les causes ? Acidification de l'eau dûe à l'augmentation des concentrations de CO2 atmosphérique ; mais plus certainement, turbidité de l'eau causée par les crèmes solaires et l'huile ou l'essence des bateaux et autres jet-skis absolument indispensables pour jouir du paysage dans le plus grand silence ; pollutions en tous genres (j'ai retrouvé en plongeant des bidons d'huile, des cannettes, des serviettes hygyéniques et j'en passe...) ; sans oublier le piétinement du corail par un public inconscient. Les herbiers de posidonie sont à l'agonie, bien aidés en cela par les bateaux qui jettent l'ancre en toute anarchie. Je suis prêt a parier que dans 5 ans l'écosystème côtier sera totalement ravagé, entraînant la disparition des poissons et la mort de la pêche, donc des restaurants et in fine du tourisme.

J'en ai parlé aux tenanciers des camps ou des restos qui ont l'air de s'en foutre comme de l'an 40. Et prochainement, l'ineffable Monsieur Hilton viendra installer un nouveau parc à bétail histoire que sa fille vienne se bronzer les fesses dans un énième lieu paradisiaque - qui ne le restera pas longtemps.

Alors par pitié, s'il vous arrive d'aller passer vos vacances dans de tels lieux, pensez aux conséquences de vos actions avant de vous livrer sans retenue au jet-ski, au parachute ascensionnel et autres conneries vitales pour votre bien-être, et laissez le corail tranquille !

samedi 4 avril 2009

Du Cap Horn aux Caraïbes

Ça sonne comme un beau programme de navigation, et c'est ce que je viens de faire... mais en bus. En effet après quelques jours à Bogotá, je suis arrivé hier à Cartagena, sur la côte Caraïbe, qui marque le bout de mon périple : je n'irai pas plus au nord. Cette étape n'était pas prévue, mais comme j'ai quitté l'Equateur plus tôt que prévu pour cause de mauvais temps et que l'appel du soleil se faisait vraiment très pressant j'ai pu me permettre de pousser jusqu'au nord de la Colombie ; ça permet de marquer symboliquement le bout de la route !


Depuis un bout de temps cette ville me faisait rêver - depuis la lointaine époque, en fait, où elle était ville d'arrivée de la transat Jacques Vabre. Et elle est exactement telle que je me l'imaginais : chaude, colorée, pittoresque, aux rues grouillantes de monde, des groupes de vieux assis sur les trottoirs aux marchants ambulants de fruits, de cigarettes et de café.


Chaque rue de la vieille ville est une orgie de couleurs et de parfums, un théâtre vivant au décor colonial et surplombé de superbes balcons chargés d'hibiscus et de bougainvillées. Les colombiens disent que si le cerveau de leur pays est à Bogotá, le coeur est à Carthagène - et je n'ai aucun mal à les croire, ayant vu les deux villes.


Les nombreuses places forment autant d'oasis rafraîchissantes et sont les bienvenues, alors que les rues se transforment en fournaise dès 10h du matin. Ici la Plaza Bolivar :


Les fortifications datent du XVIe Siècle : à Cartagenaétaient alors entreposées les tonnes d'or en route pour l'Espagne, qui formaient donc un magot convoité. Après avoir été assiégée plusieurs fois et bien amochée par les canons de Drake (celui-là même qui passa le premier le Cap Horn), leur construction fut entreprise. Les murailles sont toujours debout, juste au bord du rivage.


C'est beau, non ? Ouais. Mais je me sens de plus en plus mal à l'aise face à ces villes qui doivent leur splendeur à l'exploitation et à la misère de millions d'indigènes et d'esclaves africains. Les stigmates de ces sombres commerces sont partout.


Par exemple cette petite place juste à l'entrée de la ville, aujourd'hui remplie d'échoppes à touristes mais toujours bordée d'arcades. C'est-y pas mignon ? C'est en tout cas ce que se dit le touriste, mais je ne suis pas sûr que les centaines de milliers d'africains fraîchement débarqués des galions et qui y étaient exhibés sur des échafauds pour y être vendus pensaient exactement la même chose... Cartagena était, avec Veracruz, l'un des deux seuls ports ayant l'exclusivité pour "l'importation" d'esclaves africains ; on venait en acheter jusque depuis la Bolivie. Pour mémoire, on estime qu'environ 11 millions de "nègres" furent victime de la traite atlantique. Cartagena est l'une des villes d'Amérique du Sud ayant encore l'une des plus importantes communautés noires.


Autre exemple, ce palais avec son beau porche baroque et son petit patio planté de palmiers. Une merveille, non ? Sauf qu'il y a 200 ans, l'Inquisition y avait son siège et s'occupait des "hérétiques". De multiples instruments de torture sont exposés, certains très ingénieux, dont celui-ci que je ne connaissais pas :


L'inquisition a été abolie au début du XIXe lors de l'indépendance. Mais la haine envers les hérétiques est toujours aussi vive, à en croire une scène incroyable vécue hier soir : une foule prête à lyncher le vendeur d'un livre prétendant que Dieu n'existait pas. Il a fallu l'intervention de la police pour calmer le jeu !

mardi 31 mars 2009

Voyage en pays guerrillero

La Colombie, un nom qui sent le soufre, la coke et la guerrilla. Mais pour les non-initiés seulement (du moins si l'on s'en tient aux coins fréquentables). Car au risque de décevoir ceux qui me voyaient déjà marcher sur les traces d'Ingrid, il ne m'est rien arrivé de tout cela !

Ça partait pourtant bien : suivant à la lettre la rubrique "conseils aux voyageurs" du site de l'ambassade, je choisis de voyager de nuit depuis la frontière pour atteindre Popayan, ma première destination. Le (mini)bus part sous une pluie battante et s'arrête à un poste militaire au milieu de nulle part vers 22h. L'ambiance est irréelle : il ne pleut plus mais des orages nous entourent et le ciel flashe continuellement, l'électricité est coupée toutes les 20 minutes. Vers minuit nous sommes toujours arrêtés, alors je commence à râler auprès du chauffeur qui m'explique : il y a un peu de grabuge sur la route, donc nous attendons une escorte militaire qui nous accompagnera jusqu'à Popayan. L'armée est sur les dents : les FARC fêtent dignement la mort de Manuel Marulanda, leur leader historique, il y a tout juste un an ; le matin même, à quelques heures au nord sur la même route, ils ont incendié 7 camions (entre autres attentats)... Ambiance ! Enfin l'escorte arrive et la quinzaine de bus qui attendait part en convoi. On se croirait dans un film, mais il ne se passera rien... D'ailleurs l'escorte des convois est systématique, ça n'était pas que ce jour-là.

Le lendemain je déchante vite en visitant Popayan : encore un de ces délires du Lonely Planet qui y voit "l'une des plus belles villes de Colombie", alors que pour ma part je trouve à peine agréables ces rues toutes identiques bordées de maisons toutes blanches. L'après-midi même je pars donc pour San Agustín, une ville perdue dans les montagnes à 7h de route de là. Nouveau trajet de nuit avec arrivée à 2h, le plus épouvantable de tout mon voyage dans un bus à bout de souffle (2 pannes et une crevaison...) à rebondir sur mon siège à cause d'une piste infecte, complètement défoncée. Passons.


En planifiant mon voyage, San Agustín est le premier lieu que j'avais "spotté", intrigué que j'étais par les étranges statues qui ornent les monuments funéraires d'une société ayant jadis vécu là, de -1000 à un peu avant la conquête espagnole. Les sites étant dispersés un peu partout, je renoue donc avec mon - lointain - passé de cavalier en louant un cheval, ou plutôt un mauvais bourrin un peu con. Matinée agréable à chevaucher de site en site au milieu de paysages magnifiques. Malheureusement les nuages pourrissent un peu les photos, mais je vous laisse juger par vous-mêmes.


Une petite photo de la bête :


Encore une fois la guerrilla n'est pas loin, puisqu'à vol d'oiseau nous sommes à moins de 50km de Florencia, tout près de là où Betancourt s'est faite rapter. Mais un vieux rencontré sur le chemin, à qui je tape la discute un moment, m'assure qu'il n'y a aucun problème dans cette zone relativement touristique.

Le parc archéologique complète cette courte visite de la région qui aurait nécessité au moins 3 jours pour bien découvrir. Mais manquant de temps et d'argent (je n'ai pas changé assez à la frontière, et il n'y a pas de bureau de change à San Agustín) je dois repartir, direction Bogota.


Mais j'ai eu la chance d'être là le jour des élections municipales, l'occasion de mesurer à quel point les colombiens vivent passionément. Toute la journée s'apparente à une immense kermesse, et à l'annonce des résultats des scènes de liesse dignes d'une victoire au mondial de foot apparaissent dans les rues, tandis que les partisans des perdants sont en larmes. Une belle introduction à ce pays où la vie sociale est au centre de la vie tout court.