samedi 4 avril 2009

Du Cap Horn aux Caraïbes

Ça sonne comme un beau programme de navigation, et c'est ce que je viens de faire... mais en bus. En effet après quelques jours à Bogotá, je suis arrivé hier à Cartagena, sur la côte Caraïbe, qui marque le bout de mon périple : je n'irai pas plus au nord. Cette étape n'était pas prévue, mais comme j'ai quitté l'Equateur plus tôt que prévu pour cause de mauvais temps et que l'appel du soleil se faisait vraiment très pressant j'ai pu me permettre de pousser jusqu'au nord de la Colombie ; ça permet de marquer symboliquement le bout de la route !


Depuis un bout de temps cette ville me faisait rêver - depuis la lointaine époque, en fait, où elle était ville d'arrivée de la transat Jacques Vabre. Et elle est exactement telle que je me l'imaginais : chaude, colorée, pittoresque, aux rues grouillantes de monde, des groupes de vieux assis sur les trottoirs aux marchants ambulants de fruits, de cigarettes et de café.


Chaque rue de la vieille ville est une orgie de couleurs et de parfums, un théâtre vivant au décor colonial et surplombé de superbes balcons chargés d'hibiscus et de bougainvillées. Les colombiens disent que si le cerveau de leur pays est à Bogotá, le coeur est à Carthagène - et je n'ai aucun mal à les croire, ayant vu les deux villes.


Les nombreuses places forment autant d'oasis rafraîchissantes et sont les bienvenues, alors que les rues se transforment en fournaise dès 10h du matin. Ici la Plaza Bolivar :


Les fortifications datent du XVIe Siècle : à Cartagenaétaient alors entreposées les tonnes d'or en route pour l'Espagne, qui formaient donc un magot convoité. Après avoir été assiégée plusieurs fois et bien amochée par les canons de Drake (celui-là même qui passa le premier le Cap Horn), leur construction fut entreprise. Les murailles sont toujours debout, juste au bord du rivage.


C'est beau, non ? Ouais. Mais je me sens de plus en plus mal à l'aise face à ces villes qui doivent leur splendeur à l'exploitation et à la misère de millions d'indigènes et d'esclaves africains. Les stigmates de ces sombres commerces sont partout.


Par exemple cette petite place juste à l'entrée de la ville, aujourd'hui remplie d'échoppes à touristes mais toujours bordée d'arcades. C'est-y pas mignon ? C'est en tout cas ce que se dit le touriste, mais je ne suis pas sûr que les centaines de milliers d'africains fraîchement débarqués des galions et qui y étaient exhibés sur des échafauds pour y être vendus pensaient exactement la même chose... Cartagena était, avec Veracruz, l'un des deux seuls ports ayant l'exclusivité pour "l'importation" d'esclaves africains ; on venait en acheter jusque depuis la Bolivie. Pour mémoire, on estime qu'environ 11 millions de "nègres" furent victime de la traite atlantique. Cartagena est l'une des villes d'Amérique du Sud ayant encore l'une des plus importantes communautés noires.


Autre exemple, ce palais avec son beau porche baroque et son petit patio planté de palmiers. Une merveille, non ? Sauf qu'il y a 200 ans, l'Inquisition y avait son siège et s'occupait des "hérétiques". De multiples instruments de torture sont exposés, certains très ingénieux, dont celui-ci que je ne connaissais pas :


L'inquisition a été abolie au début du XIXe lors de l'indépendance. Mais la haine envers les hérétiques est toujours aussi vive, à en croire une scène incroyable vécue hier soir : une foule prête à lyncher le vendeur d'un livre prétendant que Dieu n'existait pas. Il a fallu l'intervention de la police pour calmer le jeu !

4 commentaires:

Véro a dit…

Pas mal comme point final... Profite bien de ces derniers jours.
On te laisse des bisous au dessus de l'Atlantique...(on décolle lundi après midi).
A bientôt :)

Anonyme a dit…

Du rêve encore du rêve et de là où je te parle il en faut car Bergen avec un peu de crachin et un plafond bas ce n'est pas très exotique! Le soleil arrive timidement mais les 15° degré sont bien loin. Veinard !

Les parapluies de Bergen a dit…

Le anonyme en question n'est autre que Mme Brigitte Dupont, dont je réfute tout bonnement les accusations quant à une météo capricieuse

Stanford Psycho a dit…

Je m'en doutais car elle fait des fotes que tu ne fais pas...

Mais je suis persuadé que cette histoire est vraie, et t'aurais du rester au Zimbabwe, ou te sortir les doigts pour aller a San Jose... ;)